Par Élizabeth Séguin
La radio de Fermont

C’était au tour du représentant d’ArcelorMittal Exploitation minière Canada de déposer sa plaidoirie au palais de justice de Sept-Îles jeudi, dans le dossier de négligence criminelle.

L’avocat de la défense, Me Michel Massicotte, a plaidé devant la cour principalement au sujet de la crédibilité des témoins entendus dans l’affaire. La période d’accusation s’étend du 3 avril 2014 au 7 juin 2019, date de l’accident de travail d’un employé au concentrateur du Mont-Wright. La victime, Jason Lemieux, a subi de graves blessures après qu’une chaine de convoyeur l’ait heurté en se brisant.

Dans sa plaidoirie, la défense met en doute la fiabilité des dires des témoins appelés par le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP). D’après lui, ces témoignages « ont manqué de fiabilité ou ont été teintés d’exagération ». Me Massicotte utilise l’exemple du bruit de cognement de la chaine, qui a été décrit « de manière théâtrale », selon Me Massicotte, tel un tir de fusil par plusieurs des témoins rencontrés. Certains ont aussi frappé vivement sur la table devant eux pour reproduire le son, faisant sursauter les personnes présentes dans la salle de cour.

Toujours selon l’avocat de la défense, il y aurait eu une concertation entre les témoins avant de se présenter devant le tribunal, les amenant à influencer les dires de chacun. Il croit aussi que le délai entre l’accident du 7 juin 2019 et le moment de ou l’accusation a été déposée a pu agir sur leur mémoire face aux événements.

Me Massicotte remet en question la pertinence de certains de ces témoins, qui auraient pu être substitués, selon lui, par des personnes davantage au fait des événements. Il ajoute que certains n’avaient aucun lien avec l’accident, que leurs témoignages étaient « contradictoires » et se questionne sur leurs rôles par rapport aux blessures subies par M. Lemieux.

« Les témoins ont rapporté des faits, pour que le tribunal déduise des habitudes ou l’attitude d’ArcelorMittal à l’égard de certains éléments de la mine, sans lien de causalité avec l’accident. » – Me Michel Massicotte. 

La défense aborde la considération de la minière envers les risques que représentaient l’équipement du convoyeur concerné pour la sécurité des travailleurs. D’après la poursuite, ces risques n’ont pas été pris en compte. Me Massicotte répond qu’ArcelorMittal a assumé ses responsabilités en termes de santé et sécurité à tous les niveaux. Il note les mesures de protection des travailleurs qui existent à la minière, les formations et les éléments de sécurité à appliquer en cas d’urgence.

Puis, l’avocat a insisté sur l’audience du témoin qualifié d’expert dans l’affaire, le technicien sénior Michel Rondeau. Il lui reproche d’avoir joué un « double rôle » à titre de témoin expert et de faits. Puisqu’il était alors à l’emploi de la firme Sotecma, qui a contribué à la confection du convoyeur, M. Rondeau a fait l’analyse des causes du bris de l’appareil en défaut.

Dans son rapport, M. Rondeau conclut que l’entretien des pièces du convoyeur étaient défaillant. Me Massicotte indique que l’expert n’avait pas les qualifications pour décrire la scène et qu’il s’est plutôt fié à des observations à partir d’images, sans analyser lui-même les défauts de l’appareil.

En ce qui concerne les observations sur les pièces d’équipement autour du convoyeur, par exemple des boulons manquants sur le garde-chaîne, Me Massicotte affirme que la poursuite n’a pu établir de preuve qu’ils étaient en lien avec l’accident de M. Lemieux. L’événement est survenu alors qu’il s’éloignait du garde-chaîne, ces pièces peuvent avoir été expulsées lors du bris.

Me Michel Massicotte plaide donc que la poursuite n’a pas été en mesure d’établir la relation entre la preuve présentée depuis le début du procès qui mènent jusqu’à l’accident, ajoutant que l’argumentaire du DPCP se base sur des observations pour déclarer ce qu’elle considère comme une infraction.

Il demande alors au tribunal de ne pas considérer les éléments généraux ou les problèmes systémiques en matière de sécurité qui n’ont aucun lien de cause avec les blessures de la victime.

La plaidoirie de l’accusée se poursuit ce vendredi, toujours à Sept-Iles.

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